Texte gagnant au Concours de vulgarisation scientifique 2024 de l’UdeS – Internet et la dépression chez les jeunes : l’œuf ou la poule?

Juillet 2024

Ce texte est un des textes gagnants du Concours de vulgarisation scientifique 2024 de l’Université de Sherbrooke.

Auteures : Maude Turcotte et Élizabeth Beaucage-McSween


Léa, adolescente de 15 ans, passe une bonne partie de son temps en ligne depuis l’âge de 13 ans. Elle navigue en moyenne sept heures par semaine sur les réseaux sociaux (p. ex : Snapchat, Instagram et TikTok). Les parents de Léa s’inquiètent puisqu’elle rapporte vivre des difficultés académiques et des défis relationnels. Ses parents remarquent qu’elle se compare souvent aux personnes qu’elle voit sur les réseaux sociaux. Elle critique négativement son apparence physique et ne semble plus s’intéresser à ses passe-temps favoris. Lorsque les parents de Léa discutent entre eux, ils la comparent à son frère de 17 ans. Celui-ci passe autant de temps sur Internet, mais semble plus heureux au quotidien. Les parents de Léa se questionnent : qu’est-ce qui explique la différence entre elle et son frère?

Cette situation représente bien l’état actuel du temps passé en ligne par les jeunes. Selon un récent sondage, 45 % d’entre eux rapportent être « presque toujours » en ligne. Le lien entre le temps passé en ligne et un faible niveau de santé mentale des jeunes a été démontré à plusieurs reprises. Toutefois, peu d’études ont réussi à démêler si c’est le temps passé en ligne qui nuit à la santé mentale ou si, au contraire, ce sont les jeunes qui ont une moins bonne santé mentale qui choisissent de passer plus de temps en ligne. Afin de répondre à cette question, Caroline Fitzpatrick, professeure à la Faculté d’éducation de l’Université de Sherbrooke, et son équipe de chercheurs ont utilisé les données de l’étude longitudinale québécoise sur le développement des enfants. Des questionnaires portant sur le nombre d’heures passées en ligne par semaine et les symptômes dépressifs ont été complétés par 897 adolescentes et 740 adolescents alors que ceux-ci étaient âgés de 13, 15 et 17 ans.

En prenant en considération les différences individuelles au niveau des symptômes dépressifs et du sexe des personnes participantes, les résultats obtenus démontrent que le temps passé en ligne par les adolescentes tend à augmenter leurs symptômes dépressifs au fil des ans, soit à l’âge de 13, 15 et 17 ans. Cela n’a toutefois pas été observé chez les adolescents. À l’inverse, les adolescentes présentant plus de symptômes dépressifs n’avaient pas tendance à passer davantage de temps en ligne.

Quand les filles se comparent, elles ne se consolent pas toujours!

Les parents de Léa comprennent maintenant que le temps passé en ligne peut avoir contribué au développement de symptômes dépressifs chez leur fille. Malgré ces nouvelles informations, un questionnement demeure : pourquoi leur fille semble davantage touchée par le temps passé en ligne que leur garçon? Serait-il possible que Léa utilise Internet plus fréquemment que son frère afin d’accéder à des plateformes de réseaux sociaux? Ces plateformes pourraient-elles exposer Léa à des images idéalisées de ses pairs, lui offrant plus d’occasions de se comparer négativement aux autres? Plusieurs pistes de réponses restent à explorer…

Dans l’optique de limiter les effets négatifs de l’usage d’Internet chez les adolescentes, il s’avère crucial que les personnes intervenantes encouragent les familles comme celle de Léa à avoir des discussions quotidiennes avec leur adolescente à propos de ce qu’elle visionne sur Internet et à instaurer un cadre clair avec elle quant au nombre maximal d’heures passées en ligne.

 

Référence de l’article scientifique sur lequel porte ce texte de vulgarisation :

Fitzpatrick, C., Lemieux, A., Smith, J., West, G., Bohbot, V. et Asbridge, M. (2023). Is adolescent internet use a risk factor for the development of depression symptoms or vice-versa? Psychological Medicine. https://doi.org/10.1017/S0033291723000284

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