Texte gagnant au Concours de vulgarisation scientifique 2025 de l’UdeS – Grandir derrière un écran : Les conséquences du temps d’écran chez les tout-petits

Ce texte est un des textes gagnants du Concours de vulgarisation scientifique 2025 de l’Université de Sherbrooke.
Auteure : Daphnée Leroux-Maurais
Durant la pandémie, Flavie, une jeune fille de 3 ans et demi, passait de 4 à 5 heures sur les écrans. Son voisin Olivier, du même âge, avait droit à une seule émission de 30 minutes le matin. Un an plus tard, à leur entrée en maternelle 4 ans, Flavie présentait davantage de difficulté à tracer des formes et avait un vocabulaire plus restreint qu’Olivier. Est-ce que l’utilisation d’appareils électroniques pourrait expliquer la différence de compétences entre Flavie et Olivier?
Avec l’accroissement actuel de l’accessibilité aux écrans, l’équipe de la professeure Caroline Fitzpatrick s’est questionnée sur leur utilisation en étudiant les données récoltées en 2020 et 2021 auprès de 315 parents de la Nouvelle-Écosse. Bien que le temps que Flavie passait sur les écrans puisse sembler énorme, l’étude montre que, pendant la pandémie, les tout-petits passaient en moyenne 3,5 heures par jour devant un écran. Un chiffre bien au-delà de la recommandation de l’Académie américaine de pédiatrie qui préconise moins d’une heure par jour (Hill et al. 2020).
Dans l’étude, environ 1 enfant sur 3 fait un usage intensif des écrans, c’est-à-dire qu’ils sont exposés à plus de 4 heures par jour aux divers appareils électroniques de leur foyer. Les résultats obtenus montrent que les jeunes utilisant intensivement des appareils électroniques présentent un développement global, soit les compétences en communication, en cognition, ainsi que les aptitudes personnelles, sociales et motrices, plus faible que ceux qui y consacrent moins de 4 heures par jour. De plus, les enfants du groupe intensif sont 4,3 fois plus à risque de retard au niveau du développement global que les utilisateurs faibles (moins de 1 heure). Ainsi, un temps d’écran excessif peut nuire au développement chez les jeunes d’âge préscolaire. Il est donc possible que le temps passé par Flavie devant les écrans contribue en partie à ses difficultés lors de son entrée en maternelle 4 ans, comparativement à Olivier.
Des petits écrans à grands impacts
Certains types d’écrans ou d’activités numériques sont-ils plus adaptés pour les jeunes enfants?
Les appareils mobiles, tels que les tablettes, présentent un potentiel d’interactivité supérieur à celui de la télévision pour les enfants. C’est pourquoi l’équipe de recherche a examiné si l’utilisation de ces appareils spécifiques est associée à un meilleur développement global. Cependant, les résultats montrent le contraire : un temps d’écran accru sur les appareils mobiles est associé à un moins bon développement. Ce dernier n’est toutefois pas associé avec un risque de retard de développement.
Le temps d’écran, un obstacle aux expériences de développement
Les jeunes du groupe d’utilisation intensif, comme Flavie, passent environ le quart de leur temps éveillé sur un appareil électronique. Ils ont donc moins d’opportunités pour des activités plus enrichissantes pour leur développement, telles que la lecture, le jeu imaginaire, etc. Or, c’est à travers ces activités que les tout-petits s’exercent à sauter, dessiner, communiquer et entrer en relation. Lorsque le temps d’écran occupe une grande part de la journée, il reste moins de place pour tout le reste.
Ces résultats soulignent l’importance pour les praticiens et praticiennes d’encourager les familles à privilégier des activités sans écran pour leurs tout-petits d’âge préscolaire. L’objectif : favoriser un développement cognitif, langagier, social et moteur optimal. Mais que disent les recherches au sujet du contenu visionné et du contexte d’utilisation? Des études récentes suggèrent que regarder un programme avec un parent pourrait être lié à un meilleur développement, mais de nombreuses questions restent encore à explorer (Madigan et al. 2020).
Référence de l’article scientifique sur lequel porte ce texte de vulgarisation :
Binet M-A, Couture M, Chevrier JR, Pagani LS, Garon-Carrier G, Fitzpatrick C. (2024). Preschooler screen time during the pandemic is prospectively associated with lower achievement of developmental milestones. Journal of Developmental and Behavioral Pediatrics, 45(3), e243-e250. https://doi.org/10.1097/DBP.0000000000001263
Autres références :
Hill, D., Ameenuddin, N., Reid Chassiakos, Y., Cross, C., Hutchinson, J., Levine, A., Boyd, R., Mendelson, R., Moreno, M., et Swanson, W. S. (2016). Media and Young Minds. Pediatrics, 138(5), e20162591. https://doi.org/10.1542/peds.2016-2591
Madigan, S., McArthur, B. A., Anhorn, C., Eirich, R., & Christakis, D. A. (2020). Associations between screen use and child language skills: A systematic review and meta-analysis. JAMA Pediatrics, 174(7), 665–675. https://doi.org/10.1001/jamapediatrics.2020.0327
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