Séance datablitz E​ : Soutenir l’adaptation positive des jeunes desservis par les services en protection de la jeunesse​ ​

Nous remercions Madeleine Prévost-Lemire pour la modération de cette séance de datablitz.

 

Communication 1 : Quels sont les facteurs associés aux enfants maltraités québécois selon qu’ils présentent une déficience intellectuelle, un trouble du spectre de l’autisme ou ces deux incapacités ?​

Par Chloé Sirois, Geneviève Paquette, Jacinthe Dion, Alexa Martin-Storey et Sonia Hélie

Résumé de la communication : Les enfants présentant des incapacités telles que la déficience intellectuelle (DI) ou le trouble du spectre de l’autisme (TSA) sont jusqu’à quatre fois plus susceptibles que les enfants sans incapacité de subir de la maltraitance (Jones et al., 2012). Or, les études qui s’intéressent aux risques et facteurs associés à la maltraitance durant l’enfance ne les distinguent pas en fonction du type d’incapacité considéré ou de leur comorbidité. Cette étude vise à identifier, parmi les enfants victimes de maltraitance, les facteurs qui distinguent les enfants présentant une DI uniquement, un TSA uniquement et ceux présentant à la fois une DI et un TSA des autres enfants ne présentant pas ces incapacités. L’Étude d’incidence québécoise des situations évaluées en protection de la jeunesse en 2014 a été utilisée; l’échantillon comprend 2778enfants âgés de 6 à 17ans (M = 11,34; ET = 3,36 ; 53% de filles). Trois régressions logistiques multivariées ont été conduites. Les enfants maltraités présentant une DI se distinguent par le fait qu’ils sont plus âgés, qu’ils présentent davantage de handicaps physiques et qu’ils ont plus souvent des parents avec une DI. Les enfants maltraités présentant un TSA se distinguent par le fait qu’ils sont plus âgés, qu’ils montrent plus d’agressivité et moins de comportements autodestructeurs. Les enfants présentant une DI et un TSA se distinguent par le fait qu’ils sont plus jeunes, qu’ils ont plus de handicaps physiques et qu’ils ont plus de comportements autodestructeurs. Les facteurs communs associés aux incapacités ou à la cooccurrence de la DI et du TSA (p.ex. déficience physique, agression) se traduisent par des besoins accrus en matière de soins, de supervision ou de protection. Ces résultats reflètent la nécessité d’une intervention plus intensive visant à soutenir le parent. Les enfants québécois maltraités présentant une ou des incapacités sont plus à risque de vivre de l’adversité en plus d’être déjà vulnérables.

 

Communication 2 : Les perturbations du trauma complexe dans la dimension de l'attachement : quelles pistes d'intervention pour les jeunes mères ayant reçu des services en protection de la jeunesse ?

Par Madeleine Prévost-Lemire, Geneviève Paquette et Anne-Marie Tougas

Résumé de la communication : Jusqu’à 44 % des femmes qui ont reçu des services en protection de la jeunesse deviennent mères avant 21ans et la grande majorité de ces jeunes mères a subi de la maltraitance dans leur enfance (Courtney et al., 2018; Kerig et al., 2016; King et al., 2011). La maltraitance subie les rend susceptibles de présenter un trauma complexe qui se définit à la fois par l’exposition prolongée à des événements traumatiques subis dans le cadre de relations proches et par les conséquences de cette exposition sur le fonctionnement adaptatif, notamment dans la dimension de l’attachement (Herman, 2015). Or, mieux connaître les perturbations liées au trauma complexe dans la dimension de l’attachement est important puisquelles peuvent miner la capacité des jeunes mères à devenir les adultes et les mères qu’elles souhaitent être. L’objectif de cette étude était de décrire les perturbations du trauma complexe liées à la dimension de l’attachement chez de jeunes mères ayant reçu des services en protection de la jeunesse. Une analyse thématique (Braun et Clarke, 2022) a été réalisée à partir d’entretiens semi-structurés documentant le trauma complexe auprès de 17jeunes mères ayant reçu des services en protection durant leur jeunesse. Les résultats suggèrent que les jeunes mères présentent une méfiance généralisée envers autrui, tout en exprimant une crainte de l’isolement et le désir d’entretenir des liens familiaux, amicaux et amoureux significatifs. Certaines relations, notamment avec leur conjoint, sont positives et leur apportent un soutien à la fois instrumental et émotionnel. Toutefois, plusieurs de leurs relations familiales, amicales ou amoureuses remplissent une fonction utilitaire en leur procurant des ressources matérielles ou financières au détriment de leur bien-être, voire maintenues en dépit de la présence de violence physique ou psychologique. Le modèle de rétablissement du trauma complexe (Herman, 2015) propose que l’intervention auprès des jeunes mères favorise l’établissement d’une sécurité notamment financière, émotive et physique dans leur vie, de même que la gestion des conséquences relationnelles du trauma complexe, et ce, dans une perspective de reprise de pouvoir.

 

Communication 3 : Les besoins des jeunes​ mères ayant reçu des services en protection de la jeunesse durant leur enfance, du point de vue des intervenantes​

Par Marie-Lee Giroux, Geneviève Paquette et Madeleine Prévost-Lemire

Résumé de la communication : Au moins 50% des jeunes femmes ayant reçu des services en protection de la jeunesse (PJ) deviendront mères avant 19ans (Dworsky et Courtney, 2010). Devenir mères tôt les catapulte dans la vie adulte (Molgat et Ringuet, 2004) alors qu’elles traversent, selon Arnett (2000), la période développementale de l’émergence à la vie adulte (18-25ans). Cette période de transition consacrée à la découverte de soi et à l’exploration des possibles (Arnett, 2000) est compliquée par les traumas et l’instabilité relationnelle qu’ont vécus ces jeunes femmes dans leur enfance (Lanctôt, 2006). Cette étude vise à identifier les besoins des jeunes mères ayant reçu des services en PJ et les relations entre ces différents besoins, et à découvrir l’importance que les intervenantes y accordent. Une analyse thématique séquencée (Paillé et Mucchielli, 2021) de 16entrevues menées auprès d’intervenantes travaillant avec ces jeunes mères a été conduite. Sixcatégories de besoins ont été identifiées : les besoins de base, les besoins relevant des compétences de l’adulte émergent, de l’aide professionnelle spécialisée, de soutien social, de répit, d’exploration et de développement identitaire, et de compétences parentales. Les intervenantes priorisent les besoins de base. Elles identifient tous les besoins à travers le prisme du développement des compétences parentales qui est le but ultime de l’intervention, sauf pour le besoin d’exploration et de développement identitaire. Ce dernier besoin correspond à un besoin de l’adulte émergent et il n’est pas priorisé par les intervenantes, car il ne répond pas à l’intérêt de l’enfant.

 

Communication 4 : Les compétences professionnelles du personnel intervenant en milieux communautaires nécessaires à l'accompagnement des parents d'enfants placés

Par Frédérike Ross, Deborah Ummel et Julie Noël

Résumé de la communication : Le placement d’un enfant par le directeur de la protection de la jeunesse (DPJ) génère souvent de grands défis pour les parents (p.ex.sentiment similaire à celui d’un deuil, consommation abusive de substances psychoactives, perte de l’identité parentale), ce qui les amène à avoir besoin de soutien (Noël et Saint-Jacques, 2015). Bien que ce ne soit pas leur mandat principal, une partie de ce soutien est offert par des personnes qui interviennent au sein des organismes communautaires de type famille (OCF) (Lacharité, 2012). Or, il existe peu de connaissances quant aux interventions qui sont réalisées par le personnel intervenant dans ce contexte et en particulier sur les compétences professionnelles qui sont mobilisées. L’objectif de cette étude qualitative est donc de décrire les compétences professionnelles que le personnel intervenant des OCF adoptent lorsqu’ils accompagnent des parents d’enfants placés. Par le biais dentrevues individuelles semi-structurées d’une durée de 60 à 90minutes, quatre intervenantes en milieu communautaire ont partagé les compétences qu’elles mobilisent dans leur pratique auprès des parents d’enfants placés. L’analyse thématique de ces données permet de présenter les résultats selon trois types de compétences : 1) savoir (p.ex. les connaissances théoriques quant aux conséquences de la négligence transgénérationnelle, les connaissances quant au processus de placement et les défis auxquels les parents peuvent faire face); 2) savoir-faire (p.ex. encourager la mise en action du parent, collaborer avec les différents services) et 3) savoir-être (p.ex. empathie, considération de l’histoire de vie du parent, disponibilité, adopter une attitude de non-jugement, favoriser une écoute active). Dans la pratique, les personnes intervenantes évoluant dans différents milieux (DPJ, CISSS, CIUSSS, organismes communautaires, etc.) devraient donc mobiliser des compétences professionnelles adaptées à la réalité dans laquelle vivent ces parents.